10- Le jeu du preneur

On ne parlera ici que de la stratégie de jeu en dehors de la chasse au petit qui fait l’objet d’un chapitre particulier.

épuiser les atouts adverses, affranchir sa longue

Affranchir la longue du preneur consiste à faire tomber les cartes qui pourraient empêcher de remporter le pli. Ainsi, si le preneur a roi, cavalier, valet, 10, 7 et 3 dans une couleur, il essayera de faire tomber la dame et les atouts pour pouvoir faire les plis des cavalier, valet et 10. Il jouera donc son roi puis le 3, le 7… jusqu’à ce que la dame tombe.

Avec cavalier, valet et 10 en main, s’il peut épuiser les atouts des défenseurs, il fera ensuite ces 3 plis. Certes , il peut également espérer une répartition avantageuse en jouant roi puis 10 qui font tomber 8 cartes de cette couleur avec la dame (pour remporter le pli du 10, le défenseur s’oblige à la mettre), ce qui lui laisse cavalier, valet, 7 et 3 maîtres s’il parvient à épuiser les atouts de la défense. La capacité du preneur à déduire les répartitions est primordial pour optimiser ce coup.

la course aux atouts

A de rares exceptions près, le preneur dispose au départ de plus d’atout que chacun des défenseurs. Il cherchera à conserver cet avantage malgré les coupes qu’il s’est aménagé pour capturer les points adverses. C’est la raison pour laquelle il a prévu un nombre de coupes et singlettes en fonction de son nombre d’atouts, sachant qu’il coupera plu vite et plus souvent que les défenseurs.

Dans un premier temps, la stratégie de l’attaquant sera donc souvent de jouer dans sa longue pour faire couper la défense le plus vite possible et conserver ainsi un avantage numérique. Lorsque sa longue sera affranchie, sa stratégie différera un peu.

Dans un second temps, lorsque le preneur a affranchi sa longue et qu’il est sûr de gagner la course aux atouts, il lui faut alors se défaire de ses cartes perdantes dans les autres perdantes. Pour cela, il n’hésitera pas à jouer dans un doubleton ou une singlette que les défenseurs ont délaissé. En effet, si le preneur continue dans sa longue, certains défenseurs n’auront plus d’atout et pourront alors sauver rois, dames et autres têtes sur les atouts restant de leur partenaires. De même, s’il joue atout pour faire tomber les derniers, il prend le risque que les défenseurs défaussent une couleur que le preneur ne maîtrise pas (doubleton ou singlette) pour, le moment venu, y placer leurs rois et dames en perdition. Pire encore si le preneur joue atout sans avoir les atouts maîtres, il s’expose à voir tomber rois et dames sur ces coups d’atout perdants.

Bien évidemment, pour que ce scénario se déroule aussi bien, il faut également empêcher les surcoupes gagnantes qui sauveront les points, les redoutables deux pour un et les tenues affichées en défense de s’exprimer. Enfin, il faut penser à mener le petit au bout.

les surcoupes gagnantes

Lorsqu’un défenseur surcoupe le preneur, cela peut être une bonne occasion de s’excuser dès lors qu’on est certain qu’aucune tête ou petit ne se sauvera. Dans le cas contraire, il faudra non seulement couper mais assurer le gain du pli sauf bien sûr si la relative faiblesse de son jeu d’atout oblige à concéder quelque réussite à la défense. Laisser passer un cavalier peut parfois être un moindre mal.

les deux pour un

Ils sont l’arme numéro 1 pour permettre à la défense de gagner la course aux atouts. C’est pourquoi le preneur au jeu fort n’hésitera pas à bloquer le coup d’atout grâce à ses atouts maîtres pour ensuite relancer sa longue.

les tenues affichées

Si un défenseur affiche sa tenue dans votre longue, le danger est grand que la défense se débarrasse de ses atouts pour sauver ses points sur la tenue, une fois qu’atouts et cartes résiduelles dans cette couleur seront partis. Là encore, le preneur devra empêcher les tours d’atout de se succéder pour jouer dans sa longue jusqu’à contraindre la tenue de tomber.

Enfin, il ne faudra pas perdre de vue le gain supplémentaire de petit au bout tant que la " bataille " de la course aux atouts peut être gagnée sans utiliser cet atout.

Les stratégies particulières

Ce flanc classique du preneur s’applique lorsqu’il y abondance d’atouts et une longue mais parfois, il manque la longue ou des atouts ce qui implique une autres stratégie.

absence de longue

Le jeu consistera à jouer une courte sans roi ni dame pour enfumer l’adversaire : croyant y voir une longue, la défense conservera peut-être l’un ou l’autre avant de comprendre que vous avez joué votre dernière carte dans cette couleur. Il faudra dans la première partie de la partie expulser les gros atouts des défenseurs en jouant un atout intermédiaire (l’atout juste en-dessous des trois plus gros atouts de la défense) voire deux si cela s’avère nécessaire.

Une fois débarrassé de vos cartes perdantes et dangereuses, vous jouerez alors votre longue d’atouts pour empêcher les atouts de défense de sauver des points et pour remporter les plis restants. Les défenseurs n’ayant pas coupé n’auront pas le temps de sauver les points.

Une variante consiste à jouer dans la couleur où l’on a pris soin de mettre la dame au chien pour tromper le détenteur du roi.

la faiblesse d’atouts

C’est le jeu typique du chat et de la souris. Avec peu d’atouts et deux bouts imprenables, vous espérez atteindre vos 41 points. Votre écart est donc riche en points. Il vous reste à cacher cette faiblesse le plus longtemps possible. Certains rejouent dans la couleur ouverte par la défense pour mentir, d’autres lancent un coup d’atout pour " faire croire ", d’autres choisissent de ne rien changé à leur style de jeu en espérant que le défenseur qui détient le petit va paralyser le jeu naturel de la défense… En tout état de cause, le jeu du preneur consiste à attendre que ça se passe et à déstabiliser la défense dans l’espoir qu’elle sacrifie des points en les croyant insauvables alors qu’ils l’étaient.

absence de longue et d’atout : l’extrême insipide

Vous avez 21, excuse, trois rois et mis 13 points à l’écart. S’il n’y a pas de coupe en défense, vous gagnerez de zéro et paierez le petit au bout. Ca fait toujours 90 points de gagnés sur une garde, laissez la défense jouer en essayant de ne pas bailler : il n’y a pas de stratégie !

l’extrême opposé

Toutes vos cartes sont gagnantes ou presque. A vous d’évaluer vos chances de chelem. Avec roi, dame, cavalier, valet et 9 et des atouts maîtres en pagaille, le 10 aura peu de chances d’être " posé " (accompagné de 4 autres cartes de cette couleur). Vous pouvez donc espérer faire un chelem dès lors que vous avez 5 atouts maîtres. La défense a en moyenne 3 atouts, une répartition inégale de type 6/2/1 est improbable. Vous annoncerez donc chelem pour lancer vos 5 atouts maîtres (Rappel : Le chelem annoncé donne l’entame). Si l’annonce du chelem est impossible (1 à 4 cartes perdantes), votre stratégie sera la même : Vous vous débarrasserez de vos perdantes…au besoin en les jouant d’entrée dès que vous serez en main puis tiendrez la stratégie ci-dessus.

Conclusion

Ces grandes lignes sont les stratégies classiques du preneur et le génie consistera à s’en écarter à bon escient pour optimiser la victoire ou, en restant dans ce cadre, à évaluer les répartitions et positions pour optimiser votre flanc de jeu. .